L’agroécologie au Liban, un parcours semé d’embûches, mais des partenaires déterminés
Inès Gerbault – qui suit les projets soutenus par Terre & Humanisme dans le monde arabe – a retrouvé notre partenaire libanais, l’association SOILS, lors d’une mission sur place, afin de suivre ses projets sur le terrain, et de définir les actions futures.
« SOILS permaculture » est née en 2014 après qu’une jeune libanaise, Rita Khawand, a découvert la permaculture en Angleterre. De retour au Liban, entourée d’amis ingénieurs agronomes, enseignants dans le secteur agricole, et professionnels de la communication, elle met l’association sur pieds, et ensemble ils lancent de nombreux projets : semences paysannes, micro-jardins, apiculture…
Entre Covid, crise politique et hyperinflation (coût de l’eau, de l’électricité, du gaz et des autres combustibles a presque quintuplé depuis l’année dernière[1]), de nombreux libanais se sont tournés vers la terre, réinvestissant des propriétés familiales, s’improvisant jardiniers, ou faisant de leur loisir de jardinage une activité professionnelle… Ainsi, SOILS a vu de nombreux agriculteurs et particuliers se tourner vers l’agroécologie depuis 2019, en quête de solutions. L’association propose en effet des formations courtes et gratuites pour apprendre à faire son propre fertilisant, ses propres semences, apprendre des techniques de résilience face au changement climatique et ainsi gagner en autonomie.
Portrait de Nour, productrice de fruits
Nour a 29 ans. Elle a repris l’exploitation de son père en 2018 après avoir fait son Master en horticulture à Wageningen (aux Pays-Bas). Ils produisent litchis, annones, avocats, bananes, pommes et agrumes.
L’exploitation utilisait alors des produits conventionnels, et utilisait des intrants chimiques pour lutter contre les maladies, les ravageurs et pour fertiliser le sol. Après avoir participé à une session de sensibilisation sur l’agroécologie avec SOILS, Nour fait son premier pas vers l’agroécologie, avec le soutien de sa famille, consciente des effets néfastes des produits phyto-sanitaires sur l’environnement et la santé.
La crise ne lui facilite pas la tâche : avec la hausse du carburant, elle a dû suspendre la vente directe aux particuliers (les livraisons devenant trop chères) et se rabattre sur le marché de gros. Ses récoltes ont également été impactées n’ayant pas les moyens de faire tourner sa pompe à eau. Elle espère s’équiper en panneaux solaires pour pallier ce problème lorsqu’elle en aura les moyens.
Malgré tout cela, Nour ne baisse pas les bras. Elle a été formée à la technique du compost chaud par SOILS il y a quelques mois, ce qui lui permet d’amender ses cultures et prévoit aussi d’en vendre, ce qui lui permettra à terme d’avoir un revenu complémentaire.
Najla et Ali, producteurs laitiers
Najla est ingénieure agricole, diplômée de l’Université américaine de Beyrouth. Elle travaille pour le Ministère de l’Agriculture en tant qu’inspectrice de règlementation. Elle et son mari ont toujours fait leur potager et eu quelques animaux pour leur consommation personnelle. En 2012, ils acquièrent des vaches et des chèvres et se mettent à faire du fromage, du beurre et du yaourt qu’ils vendent à Beyrouth dans les rares magasins proposant des produits locaux. Ils n’utilisent plus aucun produit chimique.
Cette activité agricole est aujourd’hui devenue primordiale pour Najla et sa famille: « Heureusement que la ferme est là, explique Najla, car mon salaire de fonctionnaire ne suffit plus à couvrir les besoins quotidiens».
Face à la crise, SOILS promeut non seulement l’agroécologie mais elle permet aussi à de nombreux Libanais de trouver des moyens de subsistance.
SOILS organise ainsi de nombreux ateliers de sensibilisation et des formations pratiques à l’agroécologie.
Ci-dessous, un atelier sur le « Compost chaud » mené début novembre dans le Sud du Liban. Le compost chaud permet d’amender son sol en bactéries ou mycorhizes en fonction des besoins.
SOILS sensibilise également les jeunes. Ci-dessous, une présentation aux étudiants en agronomie à l’American University of Beirut.
Nous vous proposons de découvrir en vidéo le portrait-témoignage d’Amani, formatrice pour l’association SOILS.
Si vous souhaitez suivre leurs activités, voici leur site web,leur page facebook et leur page youtube
Terre & Humanisme soutient l’association SOILS au Liban depuis 2018, notamment en proposant de la formation multi-partenariale pour plusieurs associations du pourtour méditerranéen, ainsi qu’un appui financier aux projets de diffusion de l’agroécologie.
[1] Source : https://atalayar.com/fr/content/linflation-grimpe-en-fleche-au-liban-sur-fond-de-craintes-du-fmi